Aux Glénans, la mer se conjugue au féminin

Dans l’imaginaire collectif, l’image du marin reste souvent celle du loup de mer, forcément au masculin. Pourtant, la voile est peut-être le sport le plus mixte au monde. L’un des seuls en tout cas où les femmes peuvent faire jeu égal avec les hommes en compétition. Les exemples sont nombreux, à commencer par Florence Arthaud vainqueur de la Route du Rhum 1990 ou Ellen MacArthur, deuxième du Vendée Globe en 2001. « Les femmes sont souvent plus résistantes, plus accrocheuses et plus résilientes » témoigne Isabelle Autissier, l’une des pionnières de la course au large au féminin.

Mixité et pantalons 

Aux Glénans, le machisme n’a jamais eu droit de cité. C’est une femme, Hélène Viannay, qui a contribué à la création de l’école et elle n’avait pas grand-chose à faire des convenances, quitte à parfois choquer les âmes de l’époque. Sur l’archipel, la mixité s’impose d’elle même et personne n’y trouve à redire si ce n’est la propriétaire des lieux, Madame Bolloré qui se scandalise et demande aux Glénans de quitter l’île de Loch.

A une époque où la robe est encore de rigueur pour les femmes, Hélène portait le pantalon sur les îles et ne se changeait que pour respecter les convenances à son retour sur le continent. Responsable d’à peu près tout pendant les premières années, Hélène s’occupe de l’intendance, bien sûr, mais aussi de la pédagogie. Elle devient ainsi chef de bord. Ses premiers élèves sont sceptiques, pour ne pas dire méfiants. « Mes gars n’étaient pas contents de partir avec moi. Une femme chef de bord alors que sur l’autre embarcation, il y avait un gaillard qui criait fort ! » s’amusait-elle, fière d’avoir prouvé à ces premiers stagiaires que le sens marin se mesure à l’intelligence plus qu’à la taille des biceps.

“Sereine” toujours en mer

70 ans plus tard, la féminisation a gagné du terrain puisqu’un tiers des adhérents sont des adhérentes. C’est le cas de Solenne Caous, monitrice expérimentée, gagnée par le virus de la mer dès sa plus tendre enfance. A 22 ans, l’étudiante en océanographie encadre des groupes adultes sans le moindre complexe. Elle reconnait que les stagiaires seniors, de 50 ou 60 ans, ont parfois l’air surpris en la voyant débarquer mais que les a priori sont balayés dès le « topo sécu » qui marque le début du stage. Chez les plus jeunes, personne aujourd’hui ne s’étonne de voir une femme sur un bateau. Solenne considère même qu’il y a « de plus en plus de filles ». Si la tendance se poursuit, les femmes seront un jour majoritaires sur l’eau. Peut-être auront-elles la chance d’embarquer à bord de “Sereine”, le premier bateau de l’école. Il a été baptisé ainsi en hommage au tempérament d’Hélène Viannay.

Régater entre filles

Une régate au féminin est organisée tous les ans, en septembre sur la base de Marseillan. Pas besoin d’avoir fait de la voile toute sa vie pour participer au Challenge Puri’elles puisqu’il est ouvert à tous et qu’une monitrice diplômée est à bord de chacun des bateaux. Cette année, le challenge se déroulera du 16 au 18 septembre.

Challenge Pluri’elles

  • Marseillan, du 16 au 18 septembre 2017
  • Public : Ouvert à toutes à partir de 18 ans
  • Hébergement : à bord des bateaux
  • Niveau requis : Aucun niveau préalable n’est requis

Plus d’infos :

http://www.glenans.asso.fr/fr/pratiquer/stages-de-voile/rechercher-un-stage/adultes/stage/challenge-plurielles.html

Témoignages

Solenne Caous, 22 ans :

« J’ai eu l’occasion d’encadrer des adultes de 50 – 60 ans et je sentais à leurs regards que d’être une femme, jeune, n’était pas évident au début mais c’est un premier regard qui est vite passé. Les a priori qu’il y a sur les femmes ne sont pas justifiés et je trouve qu’il y a de plus en plus de femmes. »

Isabelle Autissier :

« Les femmes sont souvent plus résistantes, plus accrocheuses et plus résilientes. Quant à l’inconfort en mer... Il ne me pèse pas, en mer on reçoit tellement d’autres bienfaits ! Mon conseil aux femmes serait de ne pas s’arrêter, de se faire confiance : c’est la détermination qui compte.

Les femmes doivent cesser de penser qu’elles sont moins capables. Elles possèdent courage, lucidité, intelligence, même si elles sont moins musclées. Pas question de les disqualifier d’entrée de jeu, ni de chercher d’emblée à pallier d’éventuelles faiblesses – réelles ou supposées. En mer, je n’ai jamais vu une femme flancher physiquement... et de toute façon lorsqu’on skippe un bateau pour la première fois, on n’est jamais bon. Que l’on soit homme ou femme ! »